FOCUS :
Communication du Dossier Patient en Psychiatrie
L’un des objectifs majeurs de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits
des malades et à la qualité du système de santé a été de permettre
aux patients un accès direct et rapide à leur dossier médical, et
complète le droit du patient ou de son représentant légal d’être
informé en toute transparence sur son état de santé.
L’hôpital est le dépositaire du dossier médical, il ne dispose
d’aucun droit d’usage exclusif sur celui-ci.
En application de l’article L1111-7 du code de la santé publique, «
toute personne a accès à l’ensemble
des informations concernant sa santé détenues, à
quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements
de santé, qui sont formalisées ou ont fait l’objet d’échanges
écrits entre professionnels de santé […] à l’exception des
informations mentionnant qu’elles ont été recueillies auprès de
tiers n’intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou
concernant un tel tiers ».
L’article R1112-2 du code de la santé publique dresse une
énumération du contenu minimum d’un dossier « médical » ; il faut
entendre par dossier médical une conception large incluant « le
dossier de soins infirmiers ou, à défaut, les informations
relatives aux soins infirmiers » ainsi que « les informations
relatives aux soins dispensés par les autres professionnels de
santé ». Ainsi, les informations recueillies dans le dossier par
l’ensemble des professionnels paramédicaux (infirmiers,
kinésithérapeutes, diététiciens, orthophonistes, ergothérapeutes…)
ainsi que les psychologues font partie intégrante du dossier
communicable au patient ou à son représentant légal.
Les
spécificités du droit d’accès en psychiatrie
La vulnérabilité particulière des patients soignés en psychiatrie
ne justifie pas de restrictions au droit du patient d’accéder
à son dossier, qui conserve par principe son droit d’accès au
dossier médical, quel que soit le régime légal de soins qui
s’applique à lui.
Par exception, des aménagements sont cependant prévus par la loi,
permettant d’imposer la présence d’un médecin à un patient afin de
l’assister lors de la prise de connaissance des informations
contenues dans le dossier.
Plusieurs conditions s’imposent alors :
- Le patient fait ou a fait l’objet de soins
psychiatriques sans consentement
- L’obligation d’accès par l’intermédiaire
d’un médecin ne peut être imposée qu’ « à titre exceptionnel et
en cas de risques d’une particulière gravité
», condition appréciée in concreto
par le praticien. Cette mesure ne saurait donc avoir un
caractère systématique.
Lorsque ces conditions sont réunies, le patient est
invité à désigner un médecin de son choix, hospitalier ou libéral.
En cas de refus, la CDSP est saisie et sera chargée d’arbitrer.
Les
détenteurs du droit d’accès
Le droit d’accès au dossier médical est détenu par :
- Le patient lui-même
- Son ayant-droit en cas de décès du
patient, pour l’un des trois motifs suivants : connaître les
causes du décès, faire valoir un droit, défendre la mémoire du
défunt. Les ayants-droits sont les héritiers du patient.
Depuis la loi du 26 janvier 2016, l’accès au dossier d’une
personne décédée par ses ayants-droits est également ouvert
aux concubins et personnes pacsées. Seuls les éléments du
dossier répondant au motif invoqué seront communiqués (sauf
pour les mineurs décédés)
- La personne ayant
l’autorité parentale en cas de patient mineur. Le mineur ne
dispose pas de droit d’accès à son dossier quant à lui. Il
peut seulement s’opposer à ce que soient communiquées aux
titulaires de l’autorité parentale les informations
constituées dans le cadre de soins délivrés sans le
consentement des parents.
- Le mandataire
judiciaire habilité en cas de patient sous mesure de
protection. Depuis la loi du 26 janvier 2016, il ne s’agit
plus de l’accès du seul tuteur, mais de l’accès du mandataire
judiciaire (tuteur ou curateur), lorsqu’il est expressément
habilité par le juge à représenter ou assister son protégé
pour la réalisation d’actes relatifs à la personne (article
459 C.Civ). Cette habilitation devra
désormais être vérifiée.
- Toute personne bénéficiant d’un mandat
écrit du patient
Les délais
légaux
La communication doit être effectuée dans un délai de 8 jours. Ce
délai est porté à deux mois pour les dossiers de plus de 5 ans (à
compter de la date de constitution de l’information).
Les
modalités d’accès
La communication peut s’effectuer, au choix du demandeur :
- Soit par consultation sur place avec, le cas
échéant, remise de copies de documents
- Soit par l’envoi de copies des documents
Les frais de copie et d’envoi sont facturables.
Le régime
des notes personnelles
Plusieurs dispositions contradictoires apparaissent au sein des
textes applicables en la matière. L’article L1111-7 du code de la
santé publique issu de la loi du 31 janvier 2007 consacre d’une
part un droit d’accès à l’intégralité des informations de santé, à
l’exception de celles concernant des tiers ou émanant de tiers.
D’autre part, le décret du 7 mai 2012 prévoit dans l’article
R4127-45-I du code de la santé publique que « les notes
personnelles de médecin ne sont ni transmissibles ni accessibles
aux patients et aux tiers ».
Dans un avis du 19 mars 2015, la Commission d’Accès aux Documents
Administratifs (CADA) est venue apporter une précision quant à la
définition des « notes personnelles » non communicables. Elle
considère que ne peuvent être qualifiée de personnelles des notes
prises par un médecin exerçant en établissement de santé public ou
privé dès lors que celles-ci sont détenues et conservées dans un
dossier partagé par tous les professionnels qui concourent à la
prise en charge du patient. En d’autres termes, seules sont
personnelles, et donc non communicables, les notes conservées en
d’autres lieux que dans le dossier papier ou informatisé du
patient, ceci signifiant qu’elles ne sont pas destinées à être
partagées ou communiquées.
En parallèle, le tribunal administratif de Melun, dans un jugement
du 16 octobre 2015, a considéré que les notes manuscrites prises
par un psychologue clinicien sont des documents qui font partie du
dossier médical en tant qu’elles participent à l’élaboration d’un
diagnostic et des soins, et sont donc communicables au patient.
Le même critère de la finalité des documents plutôt que de leur
forme avait été retenu par la cour administrative d’appel de Paris,
dans un arrêt du 30 septembre 2004, pour considérer qu’étaient
communicables des notes manuscrites rédigées par des médecins.
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