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La Brève Juridique
du Centre Hospitalier de Cadillac

2ème TRIMESTRE 2016

FOCUS : Isolement et contention


Acte attentatoire majeur à la liberté individuelle d’aller et venir, la décision d’isoler ou de contenir une personne doit nécessairement découler d’une prescription médicale. Cette décision est prise dans l’intérêt de la personne à protéger et dans le respect de sa dignité, après avoir mené une véritable évaluation médicale et une réflexion « bénéfice-risque » sur l’intérêt de cette démarche.

Le personnel infirmier applique et respecte la prescription médicale écrite, datée et signée par le médecin prescripteur (article R4312-29 CSP)  et assure la surveillance des personnes en chambre d’isolement (article R4311-6 CSP).

La mesure de contention ou d’isolement, en tant que mesure privative de liberté, doit être nécessaire, adaptée et proportionnée, tant dans son intensité que dans sa durée.

Les situations de contention et d’isolement font l’objet d’un suivi renforcé des autorités telles que la haute autorité de santé, le contrôleur général des lieux de privation de liberté ou le comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

Le juge intervient également de façon de plus en plus fréquente pour effectuer un contrôle d’opportunité et de proportionnalité du recours à la contention ou à l’isolement, et retient désormais fréquemment la responsabilité des établissements de santé ou professionnels dans de telles situations. Ainsi, la cour administrative d’appel de Marseille, dans un arrêt du 21 mai 2015, a retenu la responsabilité d’un centre hospitalier en considérant que les conditions de séjour du patient en chambre d’isolement excèdent le niveau de souffrance inhérent à cette mesure dans le cas d’espèce, et en précisant que « l’invocation de l’état d’agitation et du comportement du patient ne saurait, à elle seule, démontrer la justification médicale de la mesure, qui ne saurait se justifier qu’après qu’une réponse graduée, médicamenteuse, humaine, matérielle adaptée a été apportée à l’état du patient et ne saurait présenter un caractère punitif ou avoir seulement vocation à faciliter le travail de l’équipe soignante. »

Deux condamnations récentes d’établissements publics de santé mentale sont également à noter, en ce qu’elles se rapportent à des situations de décès survenus en chambre d’isolement. Un établissement a été condamné le 21 janvier 2016 par le tribunal administratif de Montreuil pour faute dans l’organisation du service, après le décès par suicide d’un patient qui se trouvait en chambre d’isolement, alors que, selon les juges, les équipes soignantes n’avaient pas procédé au contrôle des effets vestimentaires, le patient n’avait pas bénéficié d’une visite médicale dans les deux heures qui ont suivi son placement à l’isolement, et ne s’était pas vu administrer ses traitements du soir.

Un autre établissement a été condamné le 28 janvier 2016 par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise pour faute médicale et faute dans l’organisation du service après le décès d’une patiente à l’isolement, en retenant l’absence de réalisation d’un examen biologique prescrit, des manquements dans la tenue du dossier médical, et  des erreurs dans le choix du type d’alimentation retenu.

Au-delà du contrôle d’opportunité que le juge conduit, les situations d’isolement et de contention semblent donc bien amener le juge, en cas d’incident survenu  lors de ces placements, à porter un regard très exigeant sur les conditions de leur mise en œuvre pour apprécier l’existence d’une faute médicale ou d’une faute dans l’organisation du service.
 
Dans ce contexte, la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, dans son article 72, est venue instaurer un nouveau cadre légal pour l’isolement et la contention. Le nouvel article L3222-5-1 du code de la santé publique dispose : « l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d’un psychiatre, prise pour une durée limitée. Leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin. »

L’article L3222-5-1 impose en outre à chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie la création d’un registre spécifique où doivent être recensées toutes les mesures d’isolement et de contention. Ce registre est présenté, sur leur demande, à la CDSP, au CGLPL ou aux parlementaires.

En l’absence de décret d’application prévu, la création et l’utilisation de ce registre est requise dans les établissements autorisés en psychiatrie depuis le 28 janvier 2016.

A noter que, dans sa forme actuelle, le registre ne mentionne pas les motifs de la mise en chambre d’isolement ou de la pose de contentions. Au regard des éléments contextuels cités plus haut, il est probable que l’indication du motif sera une évolution attendue de ce registre dans les années à venir.
Le président de la Conférence des présidents de CME s’est positionné en faveur de l’installation d’un observatoire national des pratiques de contention et d’isolement, confortée en ce sens par le CGLPL souhaitant la création d’une instance nationale indépendante.

Par ailleurs, le CGLPL a dénoncé très récemment des pratiques jugées particulièrement excessives en matière d’isolement et de contention dans un établissement de l’Ain spécialisé en psychiatrie. Il devrait éditer fin mai un rapport thématique sur le recours à l’isolement et à la contention en psychiatrie. Une circulaire du ministère de la santé est également en cours de finalisation sur ce sujet.

Loi de modernisation de notre système de santé

Principales modifications issues de la loi concernant les droits des patients et mesures de soins sans consentement :
 
Coordination du parcours patient :
Obligation d’établissement d’une lettre de liaison adressée au CH par le praticien adresseur à l’admission, ainsi qu’une lettre de liaison rédigée par le praticien du CH remise au patient au moment de sa sortie et adressée au praticien adresseur et au médecin traitant.
Avec l’accord du patient, la lettre de liaison de sortie est également remise à la personne de confiance.
Les lettres de liaison peuvent être dématérialisées.
 
Accès au dossier médical / confidentialité et secret :
L’accès au dossier d’une personne décédée par ses ayants-droits est désormais ouvert aux concubins et personnes pacsées.
Pour les mineurs décédés, le droit d’accès porte désormais sur la totalité des informations médicales (sauf les éléments du dossier relatifs à des soins délivrés sans le consentement des parents du fait de l’opposition du mineur).
Accès du mandataire judiciaire : il ne s’agit plus de l’accès du seul tuteur, mais de l’accès du mandataire judiciaire (tuteur ou curateur), lorsqu’il est habilité par le juge à représenter ou assister son protégé pour la réalisation d’actes relatifs à la personne. Cette habilitation devra désormais être vérifiée.
Le praticien adresseur et le médecin traitant ont accès, sur leur simple demande, aux informations contenues dans le dossier médical, sans autorisation préalable du patient
Secret partagé : un décret d’application est attendu
 
Information du patient :

  • Obligation d’affichage des frais hospitaliers dans les lieux de réception des patients et sur le site internet de l’établissement
  • Le patient doit être informé lors de sa prise en charge que les professionnels remplissent les conditions légales d’exercice. Il est également informé que l’établissement est couvert pour garantir sa responsabilité civile ou administrative susceptible d’être engagée dans le cadre de ses activités de prévention, de diagnostic ou de soins.
  • Au moment de sa sortie, le patient recevra désormais un document l’informant du coût de l’ensemble des prestations,avec indication de la part couverte par l’assurance maladie, par la mutuelle et du reste à charge éventuel pour le patient. Un décret est attendu sur ce point.
 
Représentation des usagers :
  • La Commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge est renommée « Commission des usagers ».Elle peut désormais être présidée par un représentant des usagers. Un décret d’application est attendu pour détailler les nouvelles modalités relatives à sa composition et à son fonctionnement.
  • Les représentants des usagers siégeant dans les instances d’établissements de santé devront désormais être obligatoirement formés à l’exercice de leurs missions par les associations de représentants d’usagers agréées.
  • Une Union nationale des associations agréées d’usagers su système de santé peut être créée.
 
Consentement des patients mineurs :
L’infirmier peut désormais s’abstenir d’obtenir le consentement des titulaires de l’autorité parentale  pour une action de prévention, de dépistage ou de traitement en vue de sauvegarder la santé sexuelle ou reproductive d’une personne mineure en cas d’opposition du mineur. Le mineur doit dans ce cas être accompagné d’une personne majeure de son choix.
 
Isolement et contention :
Un nouveau cadre légal pour l’isolement et la contention est créé. Le nouvel article L3222-5-1 du code de la santé publique dispose : « l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d’un psychiatre, prise pour une durée limitée. Leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin. »
L’article L3222-5-1 impose en outre à chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie la création d’un registre spécifique où doivent être recensées toutes les mesures d’isolement et de contention. Ce registre est présenté, sur leur demande, à la CDSP, au CGLPL ou aux parlementaires.
En l’absence de décret d’application prévu, la création et l’utilisation de ce registre est requise dans les établissements autorisés en psychiatrie depuis le 28 janvier 2016.
Les établissements devront établir chaque année un rapport rendant compte des pratiques d’admission en chambre d’isolement et de contention et définir une politique pour limiter le recours à ces pratiques, puis procéder à l’évaluation de sa mise en œuvre.
 
Formalités liées à la gestion des mesures de soins sans consentement
  • sorties de courte durée pour les patients SDRE : maintien de la possibilité d’opposition du préfet notifiée au plus tard 12 heures avant la sortie, mais cette opposition doit désormais être motivée
  • Transmission des documents SDT aux autorités extérieurs par le directeur d’établissement : il n’y a plus de transmission au procureur des pièces relatives aux mesures SDT. Le Préfet n’est plus destinataire que de la décision d’admission en SDT et du certificat de levée SDT.
  • Levée SDT : le préfet n’a plus compétence pour ordonner la levée d’une mesure SDT
  • Précision concernant la saisine du JLD en cas de désaccord psychiatre/Préfet pour une levée d’hospitalisation complète en SDRE : l’intervention du JLD dans cette situation fait courir le délai de 6 mois pour un nouveau contrôle systématique du JLD
  • Précision concernant le cas de transfert d’un patient d’un établissement psychiatrique à un autre entre la saisine du JLD et l’audience prévue : l’audience a alors lieu dans l’établissement qui a procédé à la saisine
Médiation sanitaire et interprétariat linguistique
La loi consacre la médiation sanitaire et l’interprétariat linguistique en vue d’améliorer l’accès aux droits, à la prévention et aux soins. Un décret d’application est attendu.

Actualité Documentaire


OBSERVATOIRE DE LA LAICITE. Laïcité et gestion du fait religieux dans les établissements publics de santé. Paris : observatoire de la laïcité, 2016.
L’hôpital est un lieu d’accueil pour tous, en particulier de populations rendues vulnérables par la maladie aussi bien que par leur place dans la société [personnes âgées, personnes en situation de handicap, etc.]. C’est aussi un lieu où s’exprime toute la richesse du modèle social français et où la notion de service public prend le plus de sens. L’hôpital est un lieu fermé, qui prend en charge des personnes en souffrance, physique ou psychologique. Pour assurer sa mission et garantir un soin de qualité à chacun, il doit parfois s’intéresser à ce qui relève de l’intime des individus, des familles et des relations humaines. Après avoir auditionné les acteurs de terrain, l’Observatoire de la laïcité fait le constat de la nécessité de porter à la connaissance des personnels et des patients les règles qui découlent du principe de laïcité. Il constate également un besoin de formations sur les questions de laïcité et de gestion du fait religieux dans le secteur hospitalier. Face aux difficultés pratiques, l’Observatoire de la laïcité a souhaité établir un guide rappelant les réponses, encadrées par le droit, aux cas concrets relevant du principe de laïcité dans les établissements publics de santé, tant pour les personnels que pour les usagers. [Résumé d'éditeur]


FEDERATION HOSPITALIERE DE FRANCE, Commission psychiatrie et santé mentale : les propositions de la FHF, 2015
Le Conseil d’administration de la Fédération hospitalière de France a validé, lors de sa séance du 23 septembre 2015, un ensemble de recommandations visant à améliorer les prises en charge en psychiatrie, présentées par la Commission psychiatrie et santé mentale. Dans leur document, les rapporteurs soulignent en préambule la collaboration de longue date entre la FHF et les associations de patients et de familles. Ces nouvelles recommandations s’inscrivent ainsi dans le prolongement d’élaboration de diagnostics et d’orientations partagés, 'en mettant l’accent sur des priorités pouvant constituer de véritables leviers d’amélioration du système de soin et de prévention'.

Veille législative & réglementaire

Décret n° 2016-94 du 1er février 2016 portant application des dispositions de la loi du 27 septembre 2013 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.
Le texte modifie les dispositions réglementaires du code de la santé publique relatifs au programme de soins des patients relevant de soins psychiatriques, aux délais dans lesquels doivent être rendus des avis ou des expertises et aux unités pour malades difficiles, en précisant notamment les conditions d'admission dans ces unités.

Loi n°2016-87 du 2 février 2106 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie.

A la suite d’une concertation sur la question de la fin de vie, la loi pose le principe selon lequel "toute personne a droit à une fin de vie digne et apaisée. Les professionnels de santé mettent en oeuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté". La loi tend au développement des soins palliatifs. La garantie de l’accès aux soins palliatifs sur l’ensemble du territoire est inscrite dans la loi. Elle prévoit que les étudiants en médecine, les médecins, les infirmiers, les aide-soignants, les aides à domicile, les pharmaciens et les psychologues cliniciens auront obligation de suivre une formation spécifique aux soins palliatifs.

Loi n°2106-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant.

Le texte reprend les propositions de la mission qui relèvent du domaine législatif et vient "compléter la loi précitée et rappeler que, dans tous les cas, l'intérêt de l'enfant doit être la préoccupation centrale du dispositif de protection de l'enfance".

Veille jurisprudentielle

CAA de Douai, 24 Septembre 2015 :

Cet arrêt rappelle que l'appel formé contre un jugement refusant d'ouvrir une mesure de protection n'est ouvert qu'au requérant. 

CAA de Versailles, 24 octobre 2014 :

En
 

CAA , 18 Mars 2016:

Programme de soins
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Directeur de la publication : Raphaël BOUCHARD
Rédactrice : Florence HITIER-BRANDEL, juriste


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